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« L’avenir dira si la dissolution a offert à la droite sa revanche ou si elle s’est au contraire laissé enfermer dans un piège »

Cela fait des années que Nicolas Sarkozy défend cette thèse : la droite doit s’allier avec le camp macroniste pour retrouver le chemin du pouvoir et de la crédibilité, alors qu’elle s’étiole dans l’opposition depuis 2012. Plutôt que de végéter à l’extérieur, autant s’imposer de l’intérieur. « On se protège derrière un leader et puis, le moment venu, on se sépare et l’on frappe », répétait l’ancien président, assortissant parfois son propos d’un geste mimé : le poignard qu’on lève et qu’on plante, clac. Lui-même, racontait-il, a eu recours à ce stratagème (une OPA de l’intérieur) lorsqu’il était ministre de Jacques Chirac, avant de se faire élire sur la « rupture » en 2007.
Les ténors de la droite ont longtemps ignoré ce conseil tactique. La rancœur à l’endroit d’Emmanuel Macron, qui leur avait « volé » la victoire de 2017, était telle que s’allier avec l’apôtre du « nouveau monde » était inenvisageable. Ils étaient, par ailleurs, échaudés par le soin méticuleux avec lequel ce jeune président a cherché à les affaiblir (et les humilier), en braconnant dans leurs rangs. Depuis le recrutement d’Edouard Philippe et de figures du parti Les Républicains (LR) (Bruno Le Maire, Gérald Darmanin…), en 2017, jusqu’au débauchage, spectaculaire, de Rachida Dati, en janvier 2024. Lors du premier quinquennat, l’ex-président de LR, le chiraquien Christian Jacob, ne décolérait pas en rappelant qu’Edouard Philippe s’était « caché sous une couverture, à l’arrière d’une voiture », pour rejoindre discrètement le QG d’En marche !, entre les deux tours de la présidentielle de 2017 : un « traître », méprisait-il.
L’amertume n’a fait que grandir. A chaque élection, qui voyait de plus en plus d’électeurs de droite migrer vers les rives macronistes, Emmanuel Macron menait avec jubilation des opérations de déstabilisation de LR, afin de dépouiller la droite. A la présidentielle de 2022, la candidate LR Valérie Pécresse a été la cible d’une « opération démonétisation » menée depuis l’Elysée, destinée à réduire son espace politique (Macron a ainsi repris l’essentiel de son programme) et à siphonner son électorat (elle a fait 4 %). « La France est à droite. Si je veux gagner, je dois siphonner la droite », théorisait alors le président, selon les journalistes Olivier Beaumont et Nathalie Schuck, auteurs de Chérie, j’ai rétréci la droite ! Enquête (Robert Laffont, 2021).
Ce mouvement serait-il en passe de s’inverser ? Sept ans après la défaite de François Fillon, voilà la droite embarquée, à la faveur d’une crise politique inédite, dans une coalition avec la Macronie. Soucieux de préparer l’alternance en 2027, Laurent Wauquiez a d’abord plaidé pour un « soutien sans participation » au gouvernement. La perspective de voir nommer un premier ministre de gauche, puis le refus des socialistes de soutenir explicitement Bernard Cazeneuve, a mis la droite dans un corner : elle ne pouvait pas se dérober à son tour, à moins de se voir reprocher par leurs électeurs, impatients de voir le pays sortir de l’ornière, de fuir leurs responsabilités. Virage à 180 degrés : Wauquiez a permis la nomination de Michel Barnier, avant de donner son accord, mercredi 11 septembre, à la présence de députés LR au gouvernement. « Nous pouvons réaliser une formidable OPA sur l’électorat macroniste », avait glissé, en juillet, l’ex-patron des députés LR Olivier Marleix à son successeur.
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